Minutes d’amour avec Marie
– Courrier spirituel –
Les Alcooliques Anonymes
Permettez à un père de famille, qui est aujourd’hui membre des A.A. (Alcooliques Anonymes), de raconter son histoire.
Pendant des années, j’ai bu. Souvent mon salaire passait pour la boisson. Ma femme et mes enfants n’avaient à peu près rien et je continuais à boire encore. Ce qu’on peut être bête quand on perd la tête!
Un jour, je ne sais pourquoi, j’ai eu honte de moi devant la bonté de ma famille réduite à la misère. J’ai été effrayé de me voir au fond de l’abîme et d’y entraîner les miens.
J’ai eu certaines difficultés à remonter la côte. Comment expliquer que ma volonté (je croyais ne plus en avoir) ait subi une transformation au point que je résiste maintenant aux invitations qui me sont faites; j’en suis tellement heureux. D’où me vient cette force que je ne me connaissais pas?
Après avoir repris le travail régulier depuis deux ans, et ainsi avoir procuré le minimum de confort à ma famille qui est heureuse, voici que je viens de découvrir que mon troisième garçon commence à boire et qu’il néglige son ouvrage.
Ma femme ne mérite pas de pleurer encore. C’est moi le coupable. Que de mauvais souvenirs vont revenir à sa pensée; je n’ose pas lui en parler.
Depuis deux ans, je n’ai pas revu mes amis de taverne. C’est mon fils maintenant qui se prépare de gros troubles; je ne voudrais pas le laisser faire. Rechercher le bonheur au fond d’une bouteille, c’est augmenter ses troubles et ceux des autres.
J’ai essayé de parler à mon fils… il ne veut rien comprendre. Comment pourrais-je lui parler de la peine qu’il fait à sa mère après lui en avoir tant fait moi-même?…
Je me sens gauche devant mon garçon et mon épouse. Cette confidence me fait du bien. Je suis loin de comprendre encore l’attrait des autres pour la vie spirituelle, mais laissez-moi vous dire que, dans votre revue, je cherche le courrier qui nous aide à comprendre.
Un A.A. heureux
Cette confidence que vous faites simplement laisse entrevoir chez vous un coeur qui oscille entre la joie bienfaisante d’une vie rangée et l’inquiétude lancinante qui étreint votre coeur de père, devant l’inconscience de votre fils, qui se dirige dans une voie décevante d’où il sortira brisé, meurtri.
Votre expérience voudrait bien, par des conseils et confidences, lui épargner les déceptions qui l’attendent. Il est des tempéraments qui ne peuvent tolérer aucune intervention dans leur vie personnelle et qui résistent davantage s’il y a insistance sur ce point. Il leur faut briser leur orgueil et leur fatuité sur les récifs de troubles et de misères qu’ils se préparent eux-mêmes. Ce n’est qu’à ce moment qu’ils prennent conscience de leur faiblesse. C’est là que l’humilité les relève.
Vous rendez un magnifique témoignage en faveur de votre épouse qui doit goûter au charme d’un foyer revalorisé. N’hésitez pas à lui souligner votre bonheur, votre joie retrouvée. Ces sentiments heureux vont aussi s’imprégner dans la pensée de vos enfants et les aider à comprendre que le vrai bonheur est le plus souvent à notre portée.
Ayez pour votre fils cette patience qu’a eue votre épouse. Cette peine que vous redoutez pour elle sera adoucie largement par votre attitude compréhensive. Il est des heures lourdes à passer dans la vie; toutefois, elles sont allégées si les époux portent, à deux, le poids de la croix.
Ceux qui sombrent dans la boisson donnent parfois l’impression de n’avoir pas de coeur… mais si l’on savait le drame qui se joue en leur âme, dans leur détresse inavouée, leur cauchemar, les impressions changeraient, car il est des hommes que l’atavisme retient prisonniers et qui, une fois soutenus, prouvent avec courage et ténacité que leur coeur réserve des élans de générosité et de bonté.
La puissance de la grâce influe en bien des cas. Ces forces soudaines que vous ressentez en sont un témoignage éloquent. Vous, qui appartenez à ce groupe des A.A., savez déjà que la prière est un puissant moyen de transformation. Elle est belle cette prière qui est la vôtre: «Mon Dieu, donnez-moi la SÉRÉNITÉ d’accepter les choses que je ne puis changer, le COURAGE de changer les choses que je peux, et la SAGESSE d’en connaître la différence». Demeurez la joie des vôtres!
Marie-Paule
(Revue de l’Armée de Marie, volume III, numéro 7)